Compte-rendu du mardi 3 novembre 2015
Nous commençâmes nos trois heures de Théâtre
par un échauffement collectif d’environ une heure. Nous nous sommes mis en cercle et, en
silence, nous avons respiré ventralement pendant quelques minutes. Bien que cet
exercice soit simple, il est essentiel pour se recentrer et pour canaliser son
énergie. Nous avons ensuite baillé à nous en décrocher la mâchoire tout en nous
étirant, pour détendre nos muscles. Nous avons tendu notre corps le plus
verticalement possible, avant de tout lâcher en retombant en avant. Nous fîmes
cet exercice deux fois : la première fois nous nous sommes relevés en dix
secondes, la fois suivante en vingt secondes.
Une fois nos corps dans de bonnes conditions
pour travailler, nous nous sommes frottés énergiquement afin de nous dynamiser.
Lorsque nos mains sont arrivées au niveau du visage, elles ont massé nos joues
pendant que nous articulions « N-u-a-g-e ».
Après le traditionnel « Hia ! »,
jeu d’énergie où nous nous faisons passer une vague auquel tiennent nombre
d’entre nous, nous avons ajouté à notre routine un exercice proposé par notre
intervenant Pierre Ficheux la semaine précédente. A tour de rôles, nous
associions un geste le plus large possible à un son en ouvrant le plus possible
la mâchoire. Cet exercice s’inscrivait dans la continuité de mise en énergie,
mais nous l’avons fait en riant.
Pour regagner notre concentration, nous
avons resserré le cercle pour installer un courant. Si habituellement nous
sommes capables de faire passer une pression sur la main de notre voisin en
quatre secondes, ce mardi nous avons réussi du premier coup à ne faire que
trois secondes. Nous ne nous sommes donc pas appesantis sur cet exercice et
avons poursuivi avec le jeu des couleurs. Pour ce faire,
un membre du cercle envoie une balle imaginaire à la personne de son choix en
l’associant à une couleur. Celle-ci la réceptionne, en répétant ladite teinte
et en la renvoyant à qui elle veut, en donnant une nouvelle couleur etc. Cet
exercice me stresse énormément, j’ai si peur de ne pas être assez réactive que
j’en viens, par exemple, à dire « gris »
alors que les couleurs imposées sont rouge, vert, bleu et jaune. Je dois
pourtant avouer qu’il est le plus efficace que je connaisse pour se concentrer
et pour renforcer la complicité d’une troupe.
La suite de l’échauffement fut
particulièrement vocale ce jour-ci. Pour commencer tout en douceur, nous avons
fait un crescendo de rires pour sortir la voix, puis nous avons fait la même
chose avec des pleurs. Je me suis trouvée dernière à passer, ce qui m’a permis
de crier et d’échauffer mes cordes vocales. Apolline s’est portée volontaire
pour prendre en main les vocalises. Elle nous fit répéter « Zahozahozahozahoza » de plus en
plus aigu, jusqu’à passer en voix de tête. Afin que les garçons puissent
également profiter de l’exercice, Jean-Baptiste effectua le même exercice mais
en descendant de plus en plus dans les graves.
Marie-Pierre nous fit réécouter le Largo Factotum pour nous le remettre en
mémoire, puis nous l’avons travaillé. Nous avons commencé par le début, que
nous connaissions, puis nous avons avancé dans la chanson jusqu’à arriver à
« Per un barbiere di qualita, di
qualita ». Une fois qu’elle estima que nous avions suffisamment
entraîné nos voies, nous nous sommes mis par deux. L’un était Figaro qui
taillait la barbe, l’autre le client. Il m’a paru difficile de trouver des
gestes qui me semblaient réalistes tout en les exagérant, étant une femme
j’ignore absolument comment raser une barbe… Mais lorsque notre professeur nous
demanda de poursuivre notre exercice sur la musique, les gestes venaient
beaucoup plus facilement. Nous libérâmes notre camarade et continuâmes
l’exercice en marchant dans l’espace. Je n’ai pas réussi à avoir des gestes
précis, avoir un support physique aidant beaucoup dans la netteté des coups de
ciseaux imaginaires. Marie-Pierre nous conseilla de visionner des extraits du Dictateur, de Charlie Chaplin pour
nous donner une idée du travail de barbier.
Après la pause, elle nous proposa une
distribution de rôles, puis elle nous donna une scène à travailler pendant une
demi-heure. J’ai appris qu’elle m’imaginait dans le Figaro du Barbier de Séville. C’est la
pièce que je connaissais le moins, aussi étais-je un peu perdue quant à la
vision que j’avais de Figaro. Je me suis notamment demandé quelle était sa vie
sentimentale avant la trilogie de Beaumarchais… Avait-il déjà aimé une femme,
par exemple ?
Elle donna le personnage du Comte de la
première pièce à Douglas. Nous allâmes dans les loges pour travailler la scène
d’exposition, entre nos deux hommes. Après un an de séparation, Figaro et le
Comte se retrouvent par hasard, alors que ce dernier est en train d’espionner
une femme : Rosine. Douglas avait déjà eu l’occasion de réfléchir à cette
rencontre lors d’improvisations. Il imaginait un Comte hautain, dédaigneux, qui
se sert de Figaro car « deux hommes
qui jasent sont moins suspects qu’un seul qui se promène ». Pour
prendre le contrepied, j’ai opté pour un Figaro plus souple dans son corps,
avec une voix plus malicieuse. Malicieux. Ce mot est pour l’instant ma ligne de
conduite, il définit l’image que j’ai désormais de ce personnage qui a toujours
le dernier mot.
Lorsque le temps fut écoulé, nous nous
rassîmes pour voir le travail des autres. Le premier groupe fut celui de la
scène d’exposition du Mariage de
Figaro, lorsque celui-ci mesure la chambre et que Suzanne lui apprend
que le Comte veut le faire cocu. Jean-Baptiste jouait Figaro et Manon
interprétait Suzanne. J’ai trouvé leur jeu très harmonieux, tous deux se
tenaient très droits et avaient un air digne qu’on retrouve habituellement plus
chez les nobles que chez les valets. Jean-Baptiste a développé le côté amoureux
de Figaro, il n’avait d’yeux que pour sa fiancée. Celle-ci paraissait très insouciante,
innocente avec son bouquet virginal. Elle effectua une rupture, en devenant
presque agressive lorsqu’elle apprit qu’ils dormiraient dans cette chambre, à
deux pas de celle du Comte.
Pour expliquer à Figaro comment elle avait
appris les intentions du Comte, des personnages surgirent de derrière le piano
pour l’illustrer : Le Comte (Séléna), Suzanne (Cécile) et Bazile
(Lorette). L’enchaînement m’a semblé fluide, intégrer une rétrospective est un
judicieux moyen de superposer deux scènes. Les trois nouveaux arrivants
jouaient donc leur scène, puis repartaient pour laisser la place à la scène
d’exposition.
Comte, Suzanne, Bazile
PIANO
Figaro Suzanne
→ :
déplacement des personnages lors de la superposition des scènes
Nous vîmes une autre scène du Mariage de
Figaro. On y voyait Suzanne (Tiephane) et la Comtesse (Kerene). Lors
de cette discussion, Suzanne révèle à sa maîtresse que son mari projette de la
tromper avec elle. Tiephane et Kerene ont réécrit la scène, plutôt que Suzanne
parle librement à la Comtesse
de ce sujet, elles ont préféré la faire gaffer. Cela ajoutait du comique à la
situation.
Deux scènes de Figaro Divorce ont achevé la séance. La première était entre
Suzanne, jouée par Suzanne et Figaro, joué par Anton. Figaro explose de rage
devant sa femme et l’incite à partir à Grand-Bisbille, pour reprendre un salon
de coiffure. Dans l’interprétation proposée, Suzanne avait vraiment l’air de
profiter du moment présent, alors que Figaro était complètement torturé.
J’étais loin d’imaginer un Figaro aussi proche des portes de la folie, le jeu
d’Anton m’a surprise et m’a fait revoir ma conception de ce personnage.
Enfin, la dernière scène était tirée du
deuxième acte de la pièce d’Ödön von Horvàth. On y voyait une scène de dispute
entre Figaro (Elsa) et Suzanne (Justine). Suzanne veut un enfant, Figaro n’en
veut pas et se réfugie derrière l’excuse de son travail. J’ai trouvé cette
présentation très juste, Suzanne était parfaitement crédible lorsqu’elle
parlait en serrant les dents et Figaro avait l’air complètement perdu.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire