Apolline Gay et Cécile
Gautier
TL
Synthèse
des séances des 22 et 23 septembre 2015
22
septembre 2015
Dans un premier temps, nous avons
commencé par nous échauffer. Deux par deux, nous nous sommes
mutuellement dynamisé le corps, en tapotant, massant l’ensemble du
corps de notre partenaire, dans le but de nous détendre, d’évacuer
les tensions tout en échauffant notre corps. Pour optimiser notre
concentration et notre écoute, nous avons ensuite choisi d’effectuer
l’exercice de l’électricité : nous nous tenons par la main
en cercle, pendant que l’un de nous fait circuler un
« courant » par une pression sur la main de son
voisin. Le courant doit être relayé par tout le groupe le plus
rapidement possible. Marie-Pierre nous a ensuite proposé l’exercice
d’ « un geste/un son », pour remédier à notre manque
de dynamisme. Les uns à la suite des autres, nous devions effectuer
un geste accompagné d’un son, d’une onomatopée, en enchaînant
le tout le plus rapidement possible. Nous avons d’ailleurs pu
remarquer que l’influence des autres était très importante dans
cet exercice instinctif : il est souvent arrivé que plusieurs
personnes effectuent un mouvement semblable à celui de la personne
précédente : si l’un produisait un son effrayé en ayant un
geste de recul, les autres reproduisaient généralement ce genre de
réaction. Pour terminer, nous avons fait l’exercice du
« cow-boy ». Toujours en cercle, mais avec un meneur au
centre cette fois-ci, nous avons fait travailler à la fois notre
concentration, notre écoute, notre dynamisme et même notre voix. En
effet, Kerene, au centre, appelait l’un de nous, qui devait alors
se baisser tandis que ses deux voisins se « tiraient »
l’un sur l’autre – en brandissant nos bras l’un vers l’autre
tout en criant « PAN ! » le plus rapidement
possible. Cette fois-ci, nous avons même décidé d’éliminer au
fur et à mesure les personnes les moins rapides, ou qui se
trompaient. Pourtant, même si cela créait un enjeu bien plus
motivant, nous n’avons pas choisi d’éliminer à nouveau en
reproduisant l’exercice la semaine suivante ; notre but étant
de nous dynamiser, les personnes qui étaient rapidement exclues du
groupe ne pouvaient pas autant profiter de cet exercice.
Dans un second temps, afin de travailler
encore davantage les rapports entre Figaro et les différents
personnages qui l’entourent, Marie-Pierre nous a demandé de nous
diviser en deux groupes et de créer deux lignes face à face. La
moitié d’entre nous interprétait donc des Figaro, tandis que ceux
d’en face incarnaient le Comte Almaviva. Successivement, les Figaro
et les Comtes avançaient vers leur partenaire en transmettant une
intention, à laquelle l’autre devait répondre avant d’en créer
une nouvelle. Finalement, même si chaque couple proposait des
scénarios variés, les intentions étaient semblables : un
rapport de force entre le Comte et son valet. Mais ce rapport de
force, que l’on pourrait attribuer au Comte qui semblait parfois
dominer Figaro, était instable : ce dernier, grâce à des
poses, des intentions que certains ont créé, renversait la
supériorité du Comte, à l’instar de l’éloquence du valet dans
son duel verbal dans Le
Mariage. Nous avons poursuivi
l’exercice en confrontant cette fois-ci une ligne de Figaro à une
ligne de Suzanne. Les intentions créées étaient alors semblables
pour certains à la scène d’ouverture du Mariage,
que nous avions étudiée les semaines précédentes : des
gestes de séduction, un jeu amoureux, et parfois, comme dans la
scène évoquée, une tentative de refus de la part de Suzanne.
Enfin, nous avons travaillé sur des
improvisations à partir d’une scène du Barbier
de Séville, la scène 2 de
l’acte I, au cours de laquelle le Comte – qui tente de se cacher
de Bartholo – et Figaro se reconnaissent et se lancent dans une
discussion plus ou moins amicale. En effet, nos improvisations ont
révélé des interprétations très différentes de ces
retrouvailles. Pour certains, Figaro et le Comte sont de vieux amis
qui se retrouvent avec plaisir, comme par exemple l’ont montré
Suzanne et Elsa – qui évoquaient leurs souvenirs communs –, ou
Manon et Jean-Baptiste – ce dernier était un Figaro très
conciliant qui n’hésitait pas à obéir au Comte sans savoir
pourquoi il devait se cacher. Chez d’autres, une distance s’est
installée entre le Comte et son ancien valet, qui lui est toujours
inférieur, tels que dans l’impro de Séléna et Sibylle – le
Comte, bien qu’amical, reste distant et préoccupé –, ou dans
celle de Lorette et Justine – le Comte n’hésite pas à le
rabaisser, à se moquer de Figaro, qui se vexe. Mais dans cette
scène, Almaviva se cache, et se sert de Figaro pour ne pas attirer
les soupçons ; c’est ce que l’on a pu retrouver dans
l’improvisation de Camille et Cécile ; Figaro n’était
qu’un outil pour le Comte, qui restait très distant. Enfin,
d’autres groupes ont davantage caractérisé les personnages, tels
qu’Apolline et Anton, qui se sont tournés vers des personnages
clownesques, ou encore Diana et Laure, qui se sont rapprochées des
types de Commedia dell’Arte. Dans l’ensemble, ces improvisations
nous ont permis à la fois de découvrir un aspect de la relation
entre Figaro et le Comte, bien avant que ce dernier ne convoite la
fiancée de son valet, que nous ne connaissions pas forcément, mais
aussi d’apporter des nuances à cette relation, qui a été
interprétée de manière plutôt variée. Cela nous a en outre fait
travailler sur Le Barbier de
Séville, qui fait partie de
notre corpus d’œuvres au même titre que Le
Mariage, et Les
Noces de Figaro.
23
septembre
Nous
avons commencé la séance par un échauffement « à la
Pierre », c'est-à-dire comme a pu nous l'enseigner le comédien
Pierre Ficheux, que Suzanne a dirigé pour nous. Le fait de varier
les échauffements permet de connaître un maximum de formes et
d'exercices possibles, dans le but de préparer, à terme, celui de
l'épreuve du baccalauréat.
Contrairement
aux exercices que nous effectuons de manière plus habituelle,
l'échauffement « à la Pierre » comporte des courses sur
place et des exercices de coordination, qui sont couramment absents
de nos échauffements au profit d'un réveil articulaire. Un exercice
caractéristique de cet échauffement est par exemple celui de « la
pomme ». Chacun pour soi, en étant stable sur ses pieds, nous
devons attraper une pomme, ou un quelconque autre objet, à côté de
nous, puis au-dessus, puis en-dessous, et à chaque fois avec chacune
des mains. Cet exercice a pour mérite de faire travailler à la fois
l'étirement du corps, puisque nous devons étendre le corps depuis
les hanches pour attraper l'objet, la précision, puisqu'il s'agit
d'un geste répétitif, ainsi que déjà l'imagination, puisque
chacun doit visualiser de quel objet il s'agit, et montrer quel effet
il produit, quel geste il nécessite pour être attrapé.
Après
l'échauffement, un des groupes qui n'avait pas eu le temps de passer
à la dernière séance sur l'improvisation de la scène de rencontre
entre Figaro et le comte dans Le
Barbier de Séville,
a présenté son travail. Il s'agissait de Tiephane et Kerene, qui
interprétaient respectivement le comte et Figaro. Cette
improvisation montrait un Figaro très hâbleur et beau parleur,
puisque Kerene le faisait parler à un public imaginaire devant
lequel il chanterait. C'est donc ici aussi un Figaro assez sûr de
lui, voire orgueilleux qui est présenté. L'arrivée du comte était
même un dérangement pour ce Figaro. De plus, lorsque Tiephane en
comte voulait contraindre Figaro de force à se cacher, cela a fait
ressortir le fait que le Figaro proposé par Kerene était un homme
indépendant et insoumis, qui refuse d'obéir à des ordres qu'il ne
comprend pas. C'est un élément qui est ressorti particulièrement
dans cette improvisation, et qu'on n'avait pas vu dans les
présentations de la veille. Elle prenait par exemple le contrepied
de la proposition de Manon et Jean-Baptiste, où ce dernier, en
Figaro, acceptait tous les ordres du comte qui le contraignait à se
cacher, montrant ainsi un Figaro particulièrement adaptable.
L'ensemble
de ces improvisations, autour de la même scène, nous ont permis une
nouvelle réflexion sur le personnage de Figaro, puisqu'il s'agissait
d'une scène du Barbier,
pièce que nous avons moins travaillée que Le
Mariage. Cette
scène permettait donc de faire ressortir de nouveaux aspects du
personnage, d'autant que chaque proposition était différente. Par
ailleurs, dans cette scène, Figaro raconte ses mésaventures, les
différents métiers qu'il a exercés, et devient donc un personnage
romanesque, peu habituel au théâtre. En effet, sa profondeur n'est
pas commune, et, dans les faits, ce qui le démarque énormément des
autres personnages, mais aussi des personnages de théâtre en
général, c'est le fait qu'on en sache autant sur son passé, qu'il
dévoile ici dans
Le Barbier,
comme il le fera à nouveau plus tard dans le grand monologue de
l'acte V du Mariage.
Nous en sommes venus à nous rendre compte que Figaro est un type de
picaro, c'est-à-dire un homme de naissance modeste, qui vient du
peuple, voire de la campagne, mais qui s'en sort en société, en
apprenant par expérience, sans avoir d'éducation scolaire. Le
picaro est un homme qui tient à sa liberté, et qui se caractérise
également par son esprit rusé et malin. Figaro, au départ, est
tout cela. Élevé par des brigands, il traverse la vie en essayant
tous les métiers, et toujours avec un bon mot. Il est aussi
finalement assez cultivé puisqu'il écrit des vers. D'ailleurs, le
picaro apparaît au XVIe
siècle avec le roman La
Vida de Lazarillo de Tormes,
qui est justement un roman espagnol. Or, Le
Barbier et
Le
Mariage se
déroulent en Espagne. Le dernier point qui pousse à dire que Figaro
est un picaro, est simplement la sonorité de son nom : les
voyelles sont les mêmes dans les deux cas, il n'y a qu'un pas de
l'un à l'autre.
La
spécificité du personnage de Figaro est justement qu'il apparaît
dans plusieurs pièces, ce qui permet de lui définir une évolution.
On peut constater ainsi un embourgeoisement de Figaro, qui commence
dans Le
Mariage,
où il est déjà attaché à ce qui lui appartient, puisqu'il aspire
à se stabiliser dans la vie maritale, installé définitivement au
château d'Aguas-Frescas. Cet embourgeoisement sera ensuite mis en
valeur par Ödön von Horváth, dans Figaro
divorce,
où Suzanne ne supporte pas de voir Figaro se complaire dans la vie
étriquée de son salon de barbier qu'il a ouvert en Bavière.
Une
fois aboutie cette réflexion autour de cet aspect du personnage de
Figaro, nous avons visionné un extrait de l'opéra de Rossini Le
Barbier de Séville.
Il s'agissait du « Largo al factotum », c'est-à-dire
l'entrée de Figaro, ici interprétée par Peter Mattei. Cette mise
en scène mettait particulièrement en valeur l'aspect imposant, sûr
de lui, opulent, mais aussi libertin de Figaro, libertinage qu'il
reprochera au comte plus tard.
Sur
ces images extraites de cette mise en scène, on voit ainsi Figaro
véritablement indépendant et même maître des autres. Il est
entouré de femmes qui l'admirent et qui semblent partager sa
compagnie, puisqu'il les embrasse à tour de rôle. Sa boutique est
certes ambulante, mais demeure néanmoins la fierté de Figaro, qui
semble vivre dans un certain confort et bénéficie d'une renommée à
travers la ville. C'est ce qui ressort ici.
Le
travail théorique a aussi été abordé pendant la séance avec la
présentation, par deux groupes, des préfaces du Barbier
et
du Mariage.
Ce qui en est ressorti, c'est à la fois la colère de Beaumarchais,
incompris de tous ceux qui critiquent ses pièces, qui ressort au
travers du fait qu'il répond point par point aux attaques qu'on lui
fait, mais également son ironie omniprésente, ce qui montre à quel
point Figaro peut être vu comme un double de son auteur. D'ailleurs,
Figaro a lui aussi écrit des pièces. C'est donc un personnage de
porte-parole, de toute évidence.
Pour
finir la séance, nous avons dû, par groupes, tenter de réfléchir
à une forme pour le spectacle. En effet, puisque nous ne travaillons
pas sur une seule pièce, mais sur trois, ainsi que deux opéras, la
forme du spectacle doit être construite par nous-mêmes. Cela nous
donne une grande liberté, mais aussi une certaine crainte. En effet,
il s'agit à présent de mettre à l'épreuve toutes nos
connaissances du personnage de Figaro, que nous avons passé du temps
à préciser (travail qui n'est bien sûr jamais fini) pour le rendre
de la manière la plus pertinente possible. Dans notre groupe,
l'impulsion de départ à ce travail a été difficile, car nous
avions justement cette crainte face à l'inconnu. Nous ne savions pas
vraiment par quelle idée attaquer le problème. Peu à peu, cela
s'est précisé. Nous avons pensé à une forme chorale pour ouvrir
le spectacle. Un groupe important de plusieurs Figaro se trouverait
sur scène, et un comte sur la coursive. Le comte lancerait la
réplique du Barbier
« Qui
t'a donné une philosophie aussi gaie ? », ce à quoi le
groupe de Figaro répondrait la fameuse réplique de « Je me
presse de rire de tout, de peur d'être obligé d'en pleurer ».
Nous avons eu l'idée de débuter par cette réplique, parce qu'elle
résume, selon nous, la philosophie de Figaro, et montre quelle ligne
il a décidé de suivre tout au long de sa vie. Concrètement, nous
avons pensé que cette phrase pourrait être reprise en écho par
chacun des Figaro, qui représenterait un aspect du personnage, ou un
âge différent. Nous avons également pensé que cette idée de
différents Figaro pourrait être reprise plus tard dans le
spectacle, où l'un des Figaro pourrait être influencé par tous les
autres, situés par exemple sur la coursive, afin de bien les
différencier, et qui agiraient comme une sorte de conscience du
Figaro présent sur scène. Ce qu'on peut reprocher à notre travail,
c'est justement un manque de concrétisation. En effet, nous n'avons
pas pu montrer un travail au plateau à nos camarades, dans la mesure
où notre proposition nécessitait un effectif plus important. Tout
est donc resté très abstrait.
Un
autre groupe, constitué de Justine, Jean-Baptiste, Anton et Elsa, a
choisi une forme de réunion, où plusieurs Figaro débattaient de
leur point de vue de chaque situation vécue et de chaque personnage.
Ainsi, se confrontaient un Figaro double de Beaumarchais, qui
interrogeait les autres sur leur identité, un Figaro vif, ironique
et malin, un Figaro en colère, et un Figaro sentimental. Ils
n'avaient par exemple pas la même vision du comte : lorsque le
Figaro en colère se révolte contre lui, le sentimental rappelle
qu'il reste un ami, et que la fidélité est importante. Cette
proposition était intéressante dans la mesure où elle permettait
de mettre en valeur des tensions internes au personnage, qui, ici,
n'était pas en accord avec lui-même.
Le
groupe de Laure, Lorette, Olga et Diana a ensuite choisi la forme
d'un Figaro qui, au départ, serait un corps vide, symbolisé par
Laure, nourri par ses caractéristiques psychologiques, trois entités
représentées par les trois autres filles. Ainsi, dans chaque
situation rencontrée par le personnage (face au comte, face à
Suzanne...), les différentes facettes de la personnalité du
personnage lui soufflaient des consignes d'agissement pour être
maître de la situation. Cette proposition était à nouveau
intéressante, puisque, là aussi, on a une introspection de Figaro
et une sorte d'entrée dans son esprit où peuvent se heurter des
caractéristiques contradictoires parfois : ainsi, si l'une
préconisait l'emploi du langage, l'autre pouvait au contraire
inciter Figaro à répondre de manière plus franche.
Enfin,
le groupe de Kerene, Séléna, Tiephane et Océane a proposé un
tableau, une image arrêtée, où Séléna et Tiephane, placées
dos-à-dos, représentaient respectivement le Figaro du Barbier
et celui du Mariage.
Kerene était le comte face au Figaro de Séléna, et Océane était
Suzanne, face à Tiephane. Ce qui était très intéressant dans
cette proposition, c'est le fait que, lorsque les deux Figaro se
retournaient, ils se retrouvaient face à face, ce qui a permis à
tout le groupe d'imaginer que les deux Figaro de deux différentes
époques pouvaient se juger l'un l'autre, sur ce qu'ils ont été (un
homme peut-être léger), ou ce qu'ils sont devenus (un homme qui a
perdu sa liberté).
On remarque que tous les groupes ont
choisi de montrer un Figaro pluriel, dans l'âge ou dans le
caractère. Nous avons tous trouvé pertinent de montrer plusieurs
facettes du personnage. Dans les faits, ce choix est assez logique
dans la mesure où définir les diverses caractéristiques de Figaro
nous occupe depuis le début de l'année.