Compte-rendu
du mardi 8 novembre
Tandis que l'immaculée
conception était fêtée dans les plus pieuses des familles, nous
restions modestement aux côtés d'Emmanuel pour en choisir le
costume, ainsi que ceux des autres personnages de la pièce. Ceci
fait, nous commençâmes la séance de théâtre par une réflexion
autour de la Révolution.
Immédiatement l'on vit
une foule se pressant et coudoyant pour clamer ses idées ; la
belle image que c'était ! Déjà on s'y croyait, et pour
remettre un peu d'ordre Suzanne proposa d'abolir les individualités
pour le temps de la scène. Des guenilles pour uniformes devaient
faire de nous la masse dégingandée qui aurait balayé la dernière
scène de Beaumarchais pour plonger dans Horvath ; ni drapeaux,
ni allégeance à quelconque idéologie n'aurait été affichée pour
que l'effet reste purement dramatique. L'idée d'Olga fut alors de
préférer à une vague une série de tableaux « flash »
rapidement enchaînés grâce aux jeux de lumières d'un stroboscope.
« La révolution »,
dit Kerene, « est en tout et peut passer par les tremblements
de la terre ». Son idée était que notre arrivée soit
annoncée par le seul battement de nos pieds, qui aurait fait monter
l'angoisse des personnages déjà sur scène. Ni cris ni discours
enflammés ne devaient nous accompagner, mais d'autres sons tels que
celui d'une soufflerie ou le crissement d'un violon furent proposés
pour marquer cette transition de l'ancien régime à la République.
Nous n'eûmes néanmoins
guère de temps pour expérimenter nos idées, et Diana n'avait guidé
le peuple qu'un instant lorsqu'un intervenant (Pierre-Matthieu un des
metteurs en scène de la compagnie La Cabine Leslie), vint nous
proposer le calme le plus opposé à la révolution passée. « Un
personnage est un pantin à peindre », nous dit-il en nous
faisant nous asseoir un à un sur une chaise où nous devions, le
plus naturellement du monde, rester neutre en rencontrant les regards
de tous nos camarades ; autant dire que nous fûmes nombreux à
lâcher un rire ou un sourire ! La portée de cet exercice était
pourtant de nous rapprocher des bases du travail de l'« acteur
studio » de Stanislavski, qui à partir d'un corps aussi neutre
que possible, cherche à devenir intérieurement son personnage
plutôt que de le construire par la réflexion.
Suite à cela, le
metteur en scène nous donna quelques conseils de jeu ; c'est
ainsi que notre chère Diana, qu'un élan de cabri entraînait aux
antipodes de la scène, dut pour son rôle de Figaro, se fixer une
trajectoire pour son bondissant personnage. « Garde ton visage,
mais contrôle ton corps », lui conseilla-t-il ainsi qu'à nous
tous. Douglas fut quant à lui invité à devenir une image moderne
du comte, « un jeune cadre dynamique, puant, malsain et sûr de
lui ».
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