lundi 12 octobre 2015

Compte rendu de la semaine du 22 septembre

Apolline Gay et Cécile Gautier
TL
Synthèse des séances des 22 et 23 septembre 2015

22 septembre 2015

Dans un premier temps, nous avons commencé par nous échauffer. Deux par deux, nous nous sommes mutuellement dynamisé le corps, en tapotant, massant l’ensemble du corps de notre partenaire, dans le but de nous détendre, d’évacuer les tensions tout en échauffant notre corps. Pour optimiser notre concentration et notre écoute, nous avons ensuite choisi d’effectuer l’exercice de l’électricité : nous nous tenons par la main en cercle, pendant que l’un de nous fait circuler un « courant » par une pression sur la main de son voisin. Le courant doit être relayé par tout le groupe le plus rapidement possible. Marie-Pierre nous a ensuite proposé l’exercice d’ « un geste/un son », pour remédier à notre manque de dynamisme. Les uns à la suite des autres, nous devions effectuer un geste accompagné d’un son, d’une onomatopée, en enchaînant le tout le plus rapidement possible. Nous avons d’ailleurs pu remarquer que l’influence des autres était très importante dans cet exercice instinctif : il est souvent arrivé que plusieurs personnes effectuent un mouvement semblable à celui de la personne précédente : si l’un produisait un son effrayé en ayant un geste de recul, les autres reproduisaient généralement ce genre de réaction. Pour terminer, nous avons fait l’exercice du « cow-boy ». Toujours en cercle, mais avec un meneur au centre cette fois-ci, nous avons fait travailler à la fois notre concentration, notre écoute, notre dynamisme et même notre voix. En effet, Kerene, au centre, appelait l’un de nous, qui devait alors se baisser tandis que ses deux voisins se « tiraient » l’un sur l’autre – en brandissant nos bras l’un vers l’autre tout en criant « PAN ! » le plus rapidement possible. Cette fois-ci, nous avons même décidé d’éliminer au fur et à mesure les personnes les moins rapides, ou qui se trompaient. Pourtant, même si cela créait un enjeu bien plus motivant, nous n’avons pas choisi d’éliminer à nouveau en reproduisant l’exercice la semaine suivante ; notre but étant de nous dynamiser, les personnes qui étaient rapidement exclues du groupe ne pouvaient pas autant profiter de cet exercice.

Dans un second temps, afin de travailler encore davantage les rapports entre Figaro et les différents personnages qui l’entourent, Marie-Pierre nous a demandé de nous diviser en deux groupes et de créer deux lignes face à face. La moitié d’entre nous interprétait donc des Figaro, tandis que ceux d’en face incarnaient le Comte Almaviva. Successivement, les Figaro et les Comtes avançaient vers leur partenaire en transmettant une intention, à laquelle l’autre devait répondre avant d’en créer une nouvelle. Finalement, même si chaque couple proposait des scénarios variés, les intentions étaient semblables : un rapport de force entre le Comte et son valet. Mais ce rapport de force, que l’on pourrait attribuer au Comte qui semblait parfois dominer Figaro, était instable : ce dernier, grâce à des poses, des intentions que certains ont créé, renversait la supériorité du Comte, à l’instar de l’éloquence du valet dans son duel verbal dans Le Mariage. Nous avons poursuivi l’exercice en confrontant cette fois-ci une ligne de Figaro à une ligne de Suzanne. Les intentions créées étaient alors semblables pour certains à la scène d’ouverture du Mariage, que nous avions étudiée les semaines précédentes : des gestes de séduction, un jeu amoureux, et parfois, comme dans la scène évoquée, une tentative de refus de la part de Suzanne.

Enfin, nous avons travaillé sur des improvisations à partir d’une scène du Barbier de Séville, la scène 2 de l’acte I, au cours de laquelle le Comte – qui tente de se cacher de Bartholo – et Figaro se reconnaissent et se lancent dans une discussion plus ou moins amicale. En effet, nos improvisations ont révélé des interprétations très différentes de ces retrouvailles. Pour certains, Figaro et le Comte sont de vieux amis qui se retrouvent avec plaisir, comme par exemple l’ont montré Suzanne et Elsa – qui évoquaient leurs souvenirs communs –, ou Manon et Jean-Baptiste – ce dernier était un Figaro très conciliant qui n’hésitait pas à obéir au Comte sans savoir pourquoi il devait se cacher. Chez d’autres, une distance s’est installée entre le Comte et son ancien valet, qui lui est toujours inférieur, tels que dans l’impro de Séléna et Sibylle – le Comte, bien qu’amical, reste distant et préoccupé –, ou dans celle de Lorette et Justine – le Comte n’hésite pas à le rabaisser, à se moquer de Figaro, qui se vexe. Mais dans cette scène, Almaviva se cache, et se sert de Figaro pour ne pas attirer les soupçons ; c’est ce que l’on a pu retrouver dans l’improvisation de Camille et Cécile ; Figaro n’était qu’un outil pour le Comte, qui restait très distant. Enfin, d’autres groupes ont davantage caractérisé les personnages, tels qu’Apolline et Anton, qui se sont tournés vers des personnages clownesques, ou encore Diana et Laure, qui se sont rapprochées des types de Commedia dell’Arte. Dans l’ensemble, ces improvisations nous ont permis à la fois de découvrir un aspect de la relation entre Figaro et le Comte, bien avant que ce dernier ne convoite la fiancée de son valet, que nous ne connaissions pas forcément, mais aussi d’apporter des nuances à cette relation, qui a été interprétée de manière plutôt variée. Cela nous a en outre fait travailler sur Le Barbier de Séville, qui fait partie de notre corpus d’œuvres au même titre que Le Mariage, et Les Noces de Figaro.



23 septembre

Nous avons commencé la séance par un échauffement « à la Pierre », c'est-à-dire comme a pu nous l'enseigner le comédien Pierre Ficheux, que Suzanne a dirigé pour nous. Le fait de varier les échauffements permet de connaître un maximum de formes et d'exercices possibles, dans le but de préparer, à terme, celui de l'épreuve du baccalauréat.
Contrairement aux exercices que nous effectuons de manière plus habituelle, l'échauffement « à la Pierre » comporte des courses sur place et des exercices de coordination, qui sont couramment absents de nos échauffements au profit d'un réveil articulaire. Un exercice caractéristique de cet échauffement est par exemple celui de « la pomme ». Chacun pour soi, en étant stable sur ses pieds, nous devons attraper une pomme, ou un quelconque autre objet, à côté de nous, puis au-dessus, puis en-dessous, et à chaque fois avec chacune des mains. Cet exercice a pour mérite de faire travailler à la fois l'étirement du corps, puisque nous devons étendre le corps depuis les hanches pour attraper l'objet, la précision, puisqu'il s'agit d'un geste répétitif, ainsi que déjà l'imagination, puisque chacun doit visualiser de quel objet il s'agit, et montrer quel effet il produit, quel geste il nécessite pour être attrapé.
Après l'échauffement, un des groupes qui n'avait pas eu le temps de passer à la dernière séance sur l'improvisation de la scène de rencontre entre Figaro et le comte dans Le Barbier de Séville, a présenté son travail. Il s'agissait de Tiephane et Kerene, qui interprétaient respectivement le comte et Figaro. Cette improvisation montrait un Figaro très hâbleur et beau parleur, puisque Kerene le faisait parler à un public imaginaire devant lequel il chanterait. C'est donc ici aussi un Figaro assez sûr de lui, voire orgueilleux qui est présenté. L'arrivée du comte était même un dérangement pour ce Figaro. De plus, lorsque Tiephane en comte voulait contraindre Figaro de force à se cacher, cela a fait ressortir le fait que le Figaro proposé par Kerene était un homme indépendant et insoumis, qui refuse d'obéir à des ordres qu'il ne comprend pas. C'est un élément qui est ressorti particulièrement dans cette improvisation, et qu'on n'avait pas vu dans les présentations de la veille. Elle prenait par exemple le contrepied de la proposition de Manon et Jean-Baptiste, où ce dernier, en Figaro, acceptait tous les ordres du comte qui le contraignait à se cacher, montrant ainsi un Figaro particulièrement adaptable.
L'ensemble de ces improvisations, autour de la même scène, nous ont permis une nouvelle réflexion sur le personnage de Figaro, puisqu'il s'agissait d'une scène du Barbier, pièce que nous avons moins travaillée que Le Mariage. Cette scène permettait donc de faire ressortir de nouveaux aspects du personnage, d'autant que chaque proposition était différente. Par ailleurs, dans cette scène, Figaro raconte ses mésaventures, les différents métiers qu'il a exercés, et devient donc un personnage romanesque, peu habituel au théâtre. En effet, sa profondeur n'est pas commune, et, dans les faits, ce qui le démarque énormément des autres personnages, mais aussi des personnages de théâtre en général, c'est le fait qu'on en sache autant sur son passé, qu'il dévoile ici dans Le Barbier, comme il le fera à nouveau plus tard dans le grand monologue de l'acte V du Mariage. Nous en sommes venus à nous rendre compte que Figaro est un type de picaro, c'est-à-dire un homme de naissance modeste, qui vient du peuple, voire de la campagne, mais qui s'en sort en société, en apprenant par expérience, sans avoir d'éducation scolaire. Le picaro est un homme qui tient à sa liberté, et qui se caractérise également par son esprit rusé et malin. Figaro, au départ, est tout cela. Élevé par des brigands, il traverse la vie en essayant tous les métiers, et toujours avec un bon mot. Il est aussi finalement assez cultivé puisqu'il écrit des vers. D'ailleurs, le picaro apparaît au XVIe siècle avec le roman La Vida de Lazarillo de Tormes, qui est justement un roman espagnol. Or, Le Barbier et Le Mariage se déroulent en Espagne. Le dernier point qui pousse à dire que Figaro est un picaro, est simplement la sonorité de son nom : les voyelles sont les mêmes dans les deux cas, il n'y a qu'un pas de l'un à l'autre.
La spécificité du personnage de Figaro est justement qu'il apparaît dans plusieurs pièces, ce qui permet de lui définir une évolution. On peut constater ainsi un embourgeoisement de Figaro, qui commence dans Le Mariage, où il est déjà attaché à ce qui lui appartient, puisqu'il aspire à se stabiliser dans la vie maritale, installé définitivement au château d'Aguas-Frescas. Cet embourgeoisement sera ensuite mis en valeur par Ödön von Horváth, dans Figaro divorce, où Suzanne ne supporte pas de voir Figaro se complaire dans la vie étriquée de son salon de barbier qu'il a ouvert en Bavière.

Une fois aboutie cette réflexion autour de cet aspect du personnage de Figaro, nous avons visionné un extrait de l'opéra de Rossini Le Barbier de Séville. Il s'agissait du « Largo al factotum », c'est-à-dire l'entrée de Figaro, ici interprétée par Peter Mattei. Cette mise en scène mettait particulièrement en valeur l'aspect imposant, sûr de lui, opulent, mais aussi libertin de Figaro, libertinage qu'il reprochera au comte plus tard.



Sur ces images extraites de cette mise en scène, on voit ainsi Figaro véritablement indépendant et même maître des autres. Il est entouré de femmes qui l'admirent et qui semblent partager sa compagnie, puisqu'il les embrasse à tour de rôle. Sa boutique est certes ambulante, mais demeure néanmoins la fierté de Figaro, qui semble vivre dans un certain confort et bénéficie d'une renommée à travers la ville. C'est ce qui ressort ici.
Le travail théorique a aussi été abordé pendant la séance avec la présentation, par deux groupes, des préfaces du Barbier et du Mariage. Ce qui en est ressorti, c'est à la fois la colère de Beaumarchais, incompris de tous ceux qui critiquent ses pièces, qui ressort au travers du fait qu'il répond point par point aux attaques qu'on lui fait, mais également son ironie omniprésente, ce qui montre à quel point Figaro peut être vu comme un double de son auteur. D'ailleurs, Figaro a lui aussi écrit des pièces. C'est donc un personnage de porte-parole, de toute évidence.

Pour finir la séance, nous avons dû, par groupes, tenter de réfléchir à une forme pour le spectacle. En effet, puisque nous ne travaillons pas sur une seule pièce, mais sur trois, ainsi que deux opéras, la forme du spectacle doit être construite par nous-mêmes. Cela nous donne une grande liberté, mais aussi une certaine crainte. En effet, il s'agit à présent de mettre à l'épreuve toutes nos connaissances du personnage de Figaro, que nous avons passé du temps à préciser (travail qui n'est bien sûr jamais fini) pour le rendre de la manière la plus pertinente possible. Dans notre groupe, l'impulsion de départ à ce travail a été difficile, car nous avions justement cette crainte face à l'inconnu. Nous ne savions pas vraiment par quelle idée attaquer le problème. Peu à peu, cela s'est précisé. Nous avons pensé à une forme chorale pour ouvrir le spectacle. Un groupe important de plusieurs Figaro se trouverait sur scène, et un comte sur la coursive. Le comte lancerait la réplique du Barbier « Qui t'a donné une philosophie aussi gaie ? », ce à quoi le groupe de Figaro répondrait la fameuse réplique de « Je me presse de rire de tout, de peur d'être obligé d'en pleurer ». Nous avons eu l'idée de débuter par cette réplique, parce qu'elle résume, selon nous, la philosophie de Figaro, et montre quelle ligne il a décidé de suivre tout au long de sa vie. Concrètement, nous avons pensé que cette phrase pourrait être reprise en écho par chacun des Figaro, qui représenterait un aspect du personnage, ou un âge différent. Nous avons également pensé que cette idée de différents Figaro pourrait être reprise plus tard dans le spectacle, où l'un des Figaro pourrait être influencé par tous les autres, situés par exemple sur la coursive, afin de bien les différencier, et qui agiraient comme une sorte de conscience du Figaro présent sur scène. Ce qu'on peut reprocher à notre travail, c'est justement un manque de concrétisation. En effet, nous n'avons pas pu montrer un travail au plateau à nos camarades, dans la mesure où notre proposition nécessitait un effectif plus important. Tout est donc resté très abstrait.
Un autre groupe, constitué de Justine, Jean-Baptiste, Anton et Elsa, a choisi une forme de réunion, où plusieurs Figaro débattaient de leur point de vue de chaque situation vécue et de chaque personnage. Ainsi, se confrontaient un Figaro double de Beaumarchais, qui interrogeait les autres sur leur identité, un Figaro vif, ironique et malin, un Figaro en colère, et un Figaro sentimental. Ils n'avaient par exemple pas la même vision du comte : lorsque le Figaro en colère se révolte contre lui, le sentimental rappelle qu'il reste un ami, et que la fidélité est importante. Cette proposition était intéressante dans la mesure où elle permettait de mettre en valeur des tensions internes au personnage, qui, ici, n'était pas en accord avec lui-même.
Le groupe de Laure, Lorette, Olga et Diana a ensuite choisi la forme d'un Figaro qui, au départ, serait un corps vide, symbolisé par Laure, nourri par ses caractéristiques psychologiques, trois entités représentées par les trois autres filles. Ainsi, dans chaque situation rencontrée par le personnage (face au comte, face à Suzanne...), les différentes facettes de la personnalité du personnage lui soufflaient des consignes d'agissement pour être maître de la situation. Cette proposition était à nouveau intéressante, puisque, là aussi, on a une introspection de Figaro et une sorte d'entrée dans son esprit où peuvent se heurter des caractéristiques contradictoires parfois : ainsi, si l'une préconisait l'emploi du langage, l'autre pouvait au contraire inciter Figaro à répondre de manière plus franche.
Enfin, le groupe de Kerene, Séléna, Tiephane et Océane a proposé un tableau, une image arrêtée, où Séléna et Tiephane, placées dos-à-dos, représentaient respectivement le Figaro du Barbier et celui du Mariage. Kerene était le comte face au Figaro de Séléna, et Océane était Suzanne, face à Tiephane. Ce qui était très intéressant dans cette proposition, c'est le fait que, lorsque les deux Figaro se retournaient, ils se retrouvaient face à face, ce qui a permis à tout le groupe d'imaginer que les deux Figaro de deux différentes époques pouvaient se juger l'un l'autre, sur ce qu'ils ont été (un homme peut-être léger), ou ce qu'ils sont devenus (un homme qui a perdu sa liberté).
On remarque que tous les groupes ont choisi de montrer un Figaro pluriel, dans l'âge ou dans le caractère. Nous avons tous trouvé pertinent de montrer plusieurs facettes du personnage. Dans les faits, ce choix est assez logique dans la mesure où définir les diverses caractéristiques de Figaro nous occupe depuis le début de l'année.

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